CAS 1 Monsieur J. Daniel, angoisses
Consulte le 13.10.95 pour une anxiété majeure.
« Je manque terriblement de confiance en moi. J’ai toujours une peur qui est là. J’en ai l’estomac noué en permanence ». Il a stoppé le tabac en 93, et depuis 88 il a également stoppé toute boisson alcoolisée et se considère guéri de son alcoolisme. Toujours pressé. Peur de passer par certains endroits, incapable de passer sur un pont : vertige+++. Très ballonné, <<la taille serrée dans des vêtements. Peu de désirs alimentaires hormis une très forte envie de choses sucrées.
Examen physique : RAS sauf odeur des pieds très gênante.
Le remède ??? prescrit en XM l’améliorera dès le 15eme jour suivant. Revu le 20 Janvier 96, il va très bien, son angoisse est « presque partie ». Il n’a plus l’estomac noué ni de ballonnements. < de la transpiration des pieds. Trous de mémoire. Devient plus frileux alors qu’il n’avait jamais ressenti le froid auparavant. Aversion nette pour le lait. Continue de manger très sucré. Très émotif, il a vite la larme à l’oeil. Répétition de ??? en XM.
Revu en Mars 96. Va de mieux en mieux. « Au fait, mon ophtalmo dit que je n’ai plus besoin de me faire opérer mon truc à l’oeil ». Son ptérygion, que je n’avais pas vraiment remarqué aurait donc diminué. ??? en LM. En Septembre 96. Le ptérygion va et vient mais est très estompé. Beaucoup moins la larme à l’oeil. Changé ses goûts. Reste sucré, mais maintenant: très fort penchant pour le chocolat.
Questions : Quel est le remède ???, sur quels arguments le donnez-vous ? Quel est le remède complémentaire qui devient indiqué ensuite, sur quel nouvel argument ? Dans l’optique du remède complémentaire que l’on pense indiqué, quelles sont les questions fondamentales à poser pour s’assurer de son indication ?
JH Dubois. jhdubois de bluewin.ch
Cher ami, bonjour
Calc. me semble bien couvrir le cas. Toutefois Kali-c ne semble pas dénué d’intérêt.
L’aversion pour le lait et le désir de chocolat appartiennent aussi à Calc. Voici donc pour ma première approche, j’entends les grondements du Maître et attends ses remarques.
Bien amicalement, JH DuBois
Bonjour l’ami DuBois !
Non, non, je ne gronde pas. Au contraire, je me frotte les mains de te titiller les neurones. Alors, Calc. ou Kali-c, tu tournes autour des carbones. Avant tout une remarque : l’aversion pour le lait s’est nettement
aggravée après la prise du remède. Pour qu’on puisse dire qu’il s’agit d’un symptôme pathogénétique, il faudrait qu’il soit apparu avec un faisceau d’autres signes connus pour appartenir au remède prescrit, ce qui ne semble pas
franchement être le cas.
D’autre part, j’ai ignoblement fait exprès de laisser traîner ce symptôme en espérant qu’on le relèverait, de sorte que je puisse faire ma petite leçon ! Pour qu’un désir ou aversion alimentaire soit à retenir, il faut qu’il soit très marqué et/ou dissonant par rapport aux normes de l’âge ou de l’espèce. En pratique chez les adultes, l’aversion pour le lait se rencontre fréquemment, si cette aversion est forte et/ou très ancienne, elle mérite considération autrement, c’est un coup à rater le remède. A l’opposé, un enfant qui aime boire du lait, c’est banal et donc sans signification. Un enfant qui a horreur d’en boire, voilà qui nous intéresse.
Pour en revenir aux remèdes, le tableau qui domine est celui d’une grande anxiété, avec des phobies et une forte envie de sucré, certes Calc ou Kali-c en possèdent mais avant tout on est en droit d’évoquer d’abord un autre champion, qui de plus se trouve fort bien complété par ces deux autres que tu proposes. Donc pour résumer tu est déjà parti un peu trop loin.
J’attends la suite de tes commentaires ! Et merci d’être le premier à animer notre petite rubrique. Ed.
JC Ravalard. Jean-Claude.Ravalard de wanadoo.fr
Ce qui apparaît le plus proche au premier look, c’est Argentum Nitricum. Anxiété, caractère pressé, vertigineux, manque de confiance, ballonné, très forte envie de choses sucrées.
En rajoutant à la répertorisation : la transpiration des pieds gênante
<< les vétements serrés à la taille
l’aversion pour le lait
le ptérygion
le désir de chocolat
il ne reste qu’un Remède qui convient parfaitement c’est Calcarea Carb.
Un autre est très proche, c’est Lycop.
Questions à
poser pour les différencier :
Comportement vis à vis du caractère chaud ou froid des aliments ?
Vis à vis du salé ?
Agité ou somnolent le soir ?
Amitiés..J.C des H.
Ou là là ! Le Jean-Claude est déchainé ! Il va falloir que je me creuse un peu plus pour vous trouver des cas intéressants. En tout cas, je vois que tu as bien retenu comment développer le raisonnement homéopathique et que
je ne sème pas dans le désert. Il faut que tu te fasses plus confiance à toi même : le bon remède t’est apparu du premier coup. Arg-n convient parfaitement à la situation que tu analyses au début. Ensuite tu ajoutes des symptômes un peu trop en vrac, sans les relativiser assez. < par les vêtements serrés, l’envie très forte de sucré sont de très forts signes pour Arg-n et ont à peine moins de valeur que le tableau mental. Celui-ci est gouverné par les phobies, le manque de confiance en soi, le comportement pressé. Le vertige < dans les endroits élevés est aussi caractéristique, de même que le symptôme le plus intéressant parce que rare : « peur de passer par certains endroit ». Où le trouver dans le répertoire ? Peur, angles de certaines maison, de passer devant.
Pour moi, je répertoriserai donc ainsi:
Libellé de la Rubrique |
V a l R u b r i q u e |
Arg-n | Calc | Sulph | Lyc | Puls | Nat-m | Remède |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
46 | 36 | 36 | 28 | 28 | 28 | Valeur Globale du remède |
||
6 | 5 | 5 | 4 | 4 | 4 | Occurence (fréquence) |
||
12 | 11 | 10 | 11 | 7 | 5 | Total des Degré |
||
+ Psy: Peur / angles / de certaines maison… |
1 | 2 | Degré | |||||
+ Psy: Confiance en soi… | 3 | 1 | 1 | 1 | 2 | 2 | 1 | Degré |
Ve: Elevés… | 3 | 2 | 3 | 3 | 1 | 2 | Degré | |
Es: Désir / sucreries |
3 | 3 | 2 | 3 | 3 | 1 | Degré | |
+ Ab: Vetements.. |
4 | 3 | 3 | 1 | 3 | 1 | Degré | |
Mb: Transpiration / Mbres inf / Pied / nauséabonde |
1 | 1 | 2 | 2 | 3 | 3 | 1 | Degré |
Es: Aversion / lait | 3 | 2 | 2 | 2 | 1 | Degré |
Aversion / lait est désactivé et mis seulement à
titre d’exemple car je ne l’ai pas considéré pour ma prescription.
En plus, tu sais que la nature ou l’aspect des écoulements est aussi un signe important, or Arg-n possède pour ce symptôme une valorisation relative de un
point.
L’aversion pour le lait n’est pas à retenir franchement comme je l’ai développé ci-dessus en réponse à Dubois.
Nous pourrons traiter en séminaire le diagnostic différentiel Lyc / Calc, et je ne voudrais pas trop développer ici, pour ne retenir que la prescription d’Arg-n qui s’impose.
Maintenant que nous sommes parvenus à ce point, voyons la suite. Sous Arg-n, le tableau mental s’est considérablement amélioré, ainsi que les autres signes physiques. Reste de façon proéminente le désir de chocolat,
que possède certes Arg-n, mais il devient évident que cette prescription s’essouffle, il est donc certainement temps d’évoquer un remède complémentaire.
A vous de jouer.
Ed.
JH Dubois. jhdubois de bluewin.ch
Les réponses et commentaires sont fort intéressants. En première lecture j’ai aussitôt pensé à Arg-n, d’une façon générale et en particulier à cause de sa peur de passer par certains endroits. Voila pour le cerveau droit!
J’ai toutefois voulu procéder épertorisation et en utilisant directement l’index général.
Un des symptômes introduit était faux et je n’avais pas trouvé de suite la peur de à Arg-n.
Pour la suite du cas, les éléments sont maigres. Toutefois, le très fort penchant pour le chocolat et le fait que Calc. est un des remèdes qui suit bien Arg-n, à proposer Calc. pour la suite.
Ceci à condition que JD soit encore à l’oeil et du genre frileux.
Voici donc pour les neurones du cerveau gauche, celles du cerveau droit ne sont pas activées.
Bien amicalement, Jacques-Henry.
Ca chauffe drôlement, Calc. n’est sûrement pas une mauvaise idée au point où nous sommes, mais… il y a un mais. J’ai questionné le patient dans cette direction mais rien ne collait avec Calc, ou seulement de très
loin.
Pour mémoire voici la liste des remèdes qui suivent bien Arg-n: Calc., kali-c, lyss., lyc., merc., puls., sep., sil. Bien sûr, il n’est pas certain que la bonne prescription figure dans cette liste, qui au demeurant est forcément incomplète, cependant il est logique d’essayer de nous simplifier le travail au moins dans un premier temps. L’indication d’un remède complémentaire se pose quand à l’issue d’un traitement bien conduit subsiste très nettement un symptôme ou un groupe de symptôme qui ne répond pas au médicament. Souvent aussi peut apparaître un symptôme complètement nouveau (qui n’est donc pas un retour de symptôme suivant la loi de Hering) et qui est souvent caractéristique du remède complémentaire.
La question que je me suis alors posée était: quel est le remède de cette liste qui possède une très forte envie de chocolat et qui en même temps soit très phobique ?
JC Ravalard. Jean-Claude.Ravalard de wanadoo.fr
Si je comprends bien, il ne reste plus beaucoup de symptômes, son anxiété s’est éliorée, ses signes physiques ont quasi disparu. Faut-il vraiment lui donner autre chose ? Peut-être est-on arrivé à un point d’équilibre. Si on prend
les complémentaires d’arg-n. devrait venir ensuite pour les mieux placés dans le tableau de répertorisation Calc. ou Lycop. Tu dis qu’il est un peu plus frileux, j’aurai tendance à choisir Calc. qui a ce désir de chocolat. Par défaut.
Bien pensé. Cependant, à force de voir des malades on finit par estimer si la dose a agi “jusqu’à la racine” ou si le résultat est encore incomplet. En l’occurrence, les gros symptômes ont été nettoyés par Arg-n, mais le patient demeure avec son fond phobique que l’on sent prêt à rechuter.
Tu évoques comme Jacques Henri, Calcarea. Cette idée est tout à fait normale: on a tendance à aller vers le connu, envisager des remèdes que l’on connaît déjà bien. Trop souvent cette tendance est un handicap et nous prive d’un remède que nous connaissons mal et qui couvre mieux le cas qu’un polychreste plus connu. Hahnemann rappelle cette difficulté au §82 (6ème édition): “le médecin homéopathe devra toujours scruter avec soin les symptômes perceptibles et toutes leurs modalités avec autant d’exactitude et de conscience qu’avant cette découverte et se garder surtout de prescriptions routinières“.
Je me souviens ainsi d’un cas d’angine dans lequel j’avais donné Lach. sans succès: douleur à gauche, irradiation à l’oreille, < au réveil, etc. J’avais prescrit par pure routine sans tenir plus compte d’un signe qui aurait dû attirer mon attention: le début de torticolis. Une fois que Lachesis eût montré son échec et que le torticolis n’ait qu’empiré, l’image symptômatique ne pouvait qu’évoquer Lachnantes (va jeter un oeil dans le Hering) qui a parfaitement fonctionné.
Bref, il faut évoquer encore un autre remède.
Marc Bouchoucha. marc.bouchoucha de wanadoo.fr
Salut Ed .. Me voici parmi vous – Ton cas clinique évoque d’emblée Argentum Nitricum mais c’est la recherche du second remède qui est plus épineuse pour, selon moi, départager Sulfur de Calc. Ma préférence irait vers Sulfur, remède psorique de l’inconscient collectif qui nous ramène à nos peurs existentielles. Pour les départager il conviendrait de demander des modalités thermiques, des antécédents médicaux, de mieux comprendre les réactions au stress et aux situations quotidiennes – Je penche tout de même pour Sulfur compte tenu des anciens désirs d’alcool, de la précipitation, etc. En tout cas, bravo car c’est une superbe idée d’avoir mis planète homéo
sur orbite – Je t’embrasse pour les fêtes et à bientôt – Marc –
Bonjour Marco !! Super content de te voir rejoindre l’équipe ! Ca va chauffer de plus en plus.
Tant qu’à envisager un polychreste, je pencherais comme toi vers Sulfur, avec les arguments non négligeables que tu développes.
Cependant, le patient ne présente rien de caractéristique pouvant justifier unetelle prescription. Le plus phobique de la fameuse liste est sans doute Hydrophobinum (appelé ainsi fort imparfaitement comme
le remarque Hering car l’hydrophobie n’est qu’un des symptômes de la rage et de recommander le nom Lyssin, directement dérivé du grec).
Remède méconnu, je t’assure qu’on doit le rencontrer au moins 2 ou 3 fois par mois… si on le recherche. Les points d’appel: bien sûr les phobies. Mais aussi le désir de chocolat qui est souvent très marqué (au moins autant que dans Sepia ou Argentum).
Très fréquemment on retrouve la peur de l’eau, ce sont des gens qui diront ne pas prendre de bains, seulement des douches et encore en faisant bien attention de ne pas faire ruisseler de l’eau sur le visage. En outre on a aussi souvent les idées “étranges”, impulsions. Par exemple, en coupant du pain un tel dira “je me demande ce que cela ferait de me planter le couteau dans le ventre”.
Notre patient avait donc cette typique peur de l’eau qui ne s’était pas estompée malgré Arg-n, et même s’était amplifiée. Depuis plusieurs mois qu’il est sous Lyss., il se porte comme jamais. L’avenir nous dira si la prescription tient longtemps.
En attendant, je te propose de jeter un coup d’oeil à mon petit article sur Lyssinum
Ed.
DuBois Jacques-Henry jhdubois de bluewin.ch
Cher Edouard,
Ce cas a pris une tournure passionnante et très instructive et je suis heureux que ton patient se porte comme jamais.
Pour la “chocolat connexion”, Carc. vient en tête de liste et si il n’est pas spécifiquement phobique et bizarre il est certainement du genre anxieux à un degré assez élevé.
As-tu envisagé ce remède?
Avant de prescrire Arg.n, étais-tu au courant de la phobie de l’eau de JD?
Si oui, cela aurait-il permis de donner Lyss. comme premier remède afin de bien nettoyer le mental de JD et ainsi voir disparaître bien des maux psychosomatiques?
Je sais que l’approche psy est à la mode mais l’approche somatopsychique donne aussi de bons résultats à condition que les symptômes soient bien caractéristiques.
Au stade ou en est JD, as-tu l’impression d’avoir trouvé le remède qui couvre l’universalité du cas ou au contraire penses-tu ne tenir qu’un Simillimum voir un Simile.
Je serais heureux de connaître ton avis.
Voici donc pour ces quelques questions et remarques qui me viennent à l’esprit en relisant l’ensemble du cas.
Avec mes meilleures salutations, Jacques-Henry
Cher Jacques Henri, tes commentaires sont très intéressants, et je vais essayer de les relever brièvement… si tant est que je sache être bref dans ce domaine…
Chocolat connexion: je place en effet en tête Carc, Lyss, et Sep. Sur un tel terrain phobique il est indiscutable que Carc est à envisager, d’autant que je pense que ce remède possède aussi la peur de l’eau.
Cependant pour faire une indication de Carc il manque le côté méticuleux, l’anticipation. Autant Carc peut être phobique, autant il sera prévoyant, alors que Lyss possède un côté impulsif (notions étranges, idées folles comme jeter un
verre d’eau au visage de son interlocuteur, etc). Mon interrogatoire était incomplet et je n’avais pas pensé à chercher la peur de l’eau. Mais je pense que même si j’avais eu cette donnée, j’aurais d’abord donné Arg-n pour calmer les
gros symptômes et finir ensuite avec Lyss. Dans la même veine, il ne faut pas hésiter à donner Nux avant Sulph, ou Sep; Puls avant Sulph ou Lyc, etc. On en reparlera.
L’approche “psy” est en effet à la mode et tu sais comme le mot “mode” en médecine me fait grincer les dents. L’homéopathie est peu appréciée dans certains milieux car elle s’appuie sur des lois intangibles,
faisant fi des modes et de leurs retombées commerciales. Indiscutablement l’approche psy permet d’apporter certains éclairages intéressants, mais il faudrait selon moi la réserver à ceux qui ont suffisamment de bouteille pour ne
pas s’égarer et qui conçoivent qu’il ne s’agit là que d’une voie de recherche. Rappelons que le malade se comporte comme un tout et qu’on ne peut le réduire à son psychisme ou à ses seuls organes…
Pour savoir si on a donné le simillimum, en tout cas celui du moment, je partage complètement l’approche pragmatique de Kent (voir Lesser Writings): si à la suite de la prescription on a eu une amélioration
nette et que les symptômes commencent à revenir inchangés, alors on a le simillimum. Autrement, l’image symptômatique revient changée, ce qui était notre cas avec Arg-n. Pour l’instant JD va super, il est évident qu’il
aura tôt ou tard besoin soit d’une répétition soit encore d’un autre remède qui reste à déterminer.
Michel Eytan LILoL eytan de dpt-info.u-strasbg.fr
Cher Dr. Broussalian,
Je suggère Ammonium carbonicum.
Voici quelques indications sur les symptômes donnés a votre page Web. Entre crochets je mets le degre suivi du nom d’auteur avec
A = Allen, The Encyclopedia of Pure Materia Medica vol. 1, Jain, New Delhi
K = Kent, Repertory of the homoeopathic Materia Medica, Jain, New Delhi
* Manque de confiance:
Considerable ill-humour and dissatisfied feeling [1, A]
She has rest nowhere and succeds in nothing [1, A]
* Peur
Very easily frightened [1, A]
Fear [1, K]
* Peur de passer par certains endroits, incapable de passer sur un pont, vertige+++:Vertigo [2, K] [1,A]
Vertigo, fall tendency to [1, K]
* Tres ballonne, << la taille serree dans des vetements:
Abdomen painfully distended [1, A]; et nombreux symptomes analogues
The clothes press on the stomach [2, A]
Flatulence [1, K]
* Envie de choses sucrees: Desires, sweets [2,K]
Remarque: bien que l’un des anti-psoriques de Hahnemann, Am-c me semble sous-evalue, sous-repertorie, sous-prescrit, sous-experimente cliniquement (peu de chose dans la MM de Hering). Et tout comme certains autres
remedes, difficile a “sortir” par repertorisation — cf ce que dit Kent dans sa MM sur Ruta(? je ne l’ai pas au bureau).
Je vous souhaite une Bonne et Heureuse Annee 1997.
Cher ami, tout d’abord merci d’avoir pris le temps de nous écrire. C’est vraiment une surprise d’évoquer Am-c dans le cas de JD, voyons un peu de quoi il retourne.
Tout d’abord il est certain que ce remède est sous prescrit tout simplement parce que peu expérimenté, et pas étudié (trop de prescripteurs se contentent d’une demi homéopathie + allopathie) et aussi parce
que peu présent dans le Répertoire.
Depuis bientôt cinq ans je dissèque patiemment, aidé de quelques amis dévoués, tout le Hering en comparant avec le contenu du Répertoire. Ce travail de bénédictin se révèle passionnant à bien des égards. D’abord on dépiste encore des erreurs d’abréviation (genre Graph pour Raph). Ensuite cela permet de comprendre selon quels mécanismes Kent a réalisé le Répertoire en généralisant ou non les symptômes (ceci aurait dû à mon avis
être mieux étudié par les auteurs du “Complete Repertory” qui auraient ainsi économisé une place considérable). Enfin, il nous est devenu clair que Kent a eu pour stratégie d’incorporer d’abord les polychrestes (qui restent tout de même la base de notre prescription), quitte à n’incorporer des “petits” remèdes que les signes qui lui ont semblé importants. Dès lors, il est clair que bien des additions d’Am-c vont suivre… dans le futur Répertoire.
Pour compléter, j’ajoute que Kent s’est
indubitablement servi de l’index du Allen comme base à son Répertoire. Or, on constate de nombreux manques qui ne peuvent s’expliquer que par un choix volontaire de sa part. Ailleurs, celui-ci déplore que Allen ait pris le parti
d’incorporer dans son encyclopédie des symptômes de toutes provenances, tout en les référençant (exemple aussi à méditer selon moi par beaucoup d’auteurs modernes). Selon Kent bien des signes sont sujet à caution car provenant
d’auteurs peu fiables. Cela explique certainement son attitude, et je pense que c’est peu prudent de vouloir ajouter à partir du Allen ce que Kent avait déjà sous la main et a rejeté. Pour Hering, le cas est différent, car Kent ne
disposait pas d’un ouvrage semblable à l’index de Allen et n’a pu exploiter exhaustivement la mine que représente cet ouvrage. D’ailleurs, à partir du 4ème volume il faut aussi être prudent car Hering étant mort entre temps, le travail
ne s’est pas poursuivi avec la même rigueur.
Venons en à Am-c. Je pense qu’en pratique les grands points d’appel sont les palpitations (violentes, < mouvement, etc) avec la tendance à la défaillance (et à saigner facilement). Les malades sont souvent très fatigués (Ars), frileux et veulent de l’air (pour > la dyspnée).
Sur un tel tableau de défaillance cardiaque, les vertiges sont nombreux. Avec ces symptômes, on trouve donc des malades anxieux, pleins d’appréhensions (Hering: feeling of impending trouble, listless, anguish as if a crime had
been committed). Le remède se rapproche beaucoup de Phos, de Lach (suffocation, < au réveil, rêve effrayants et très vivaces, etc) avec lequel il est souvent confondu.
En aucun cas Am-c n’est dominé par les phobies comme c’était le cas de JD (et d’Arg-n). Les autres symptômes de peur et de tendance à s’effrayer ne s’adaptent pas assez au tableau, et sont aussi communs à bien d’autres remèdes. Le signe caractéristique: peur de passer en certains endroits n’est pas connu de Am-c. L’aggravation par les vêtements serrés n’est pas connue dans Am-c: on a du ballonnement, mais plein d’autres remèdes aussi possèdent ce signe, que les vêtements appuient sur l’estomac n’a pas la même signification que l’intolérance à être serré.
Du coup il serait peut être intéressant d’évoquer des cas d’Am-c. Je vais en sortir de mes cartons, mais je prie tous ceux qui le désirent de nous contacter.
Ed.
Commentaires
bravo pour ce cas très bien disséqué . mais comment peut on se procurer Lyssin?
jean coutant
Sur internet, par exemple http://www.helios.co.uk, ou en Suisse, qui reste un pays plus libre que la France, etc.
Bonjour,
Je ne peux m’empêcher de faire un parallèle entre la P.N.L et la façon de dérouler le cas jusqu’à la conclusion pour en déduire le remède adapté.Trés amusant, le niveau de perception des intervenants, les spécifiques dominent. Ce n’est pas une critique puisque chacun privilégie sans en avoir conscience, l’un ou l’autre. Le must étant de le savoir et de passer de l’un à l’autre. Un cas “simple” avec une perception globale, devient compliqué avec une perception spécfique car chaque détail devient une occasion de s’embourber quand on omet les grands traits.
Pourtant si on prend du recul, votre description initiale brosse à grands traits arg-n: peur ,phobique, Pressé, vertiges, soucis digestif, envie de sucré. Cas d’école diront certains.
Perceptions spécifiques ou globales.
Ce que je perçois : je peux percevoir en premier le détail (spécifique) ou le tout (global) et de ce fait passer de l’un à l’autre, c’est ce que l’on appelle en PNL le champ de perception.
Désolé pour le hors sujet mais cest troublant en utilisant seulement la distinction global/spécifique.
Bonjour,
On peut tracer des parallèles entre l’homéopathie et plein de choses, d’où le danger d’un certain syncrétisme qui guette parfois certains “amalgamateurs” qui ne se doutent pas qu’il appauvrissent la doctrine homéopathique en pensant l’améliorer.
Vous avez raison de souligner que la relation avec la PNL s’impose car l’homéopathie nos démontre que nous fonctionnons tous selon un système qui nous est propre, profondément ancré dans le cerveau reptilien, d’où notre décodage de la réalité sera issu. Notre comportement quotidien, nos projections, seront définies dans leurs grandes lignes par cette perception “primaire”. Il y a fort à parier aussi que cela ne soit pas sans influencer directement le système nerveux autonome à un niveau des plus primitifs et qu’au bout du compte -et des années- surviennent des modifications chimiquement dosables qui mènent à leur tour à des changements anatomiques -tissulaires, tumeurs, etc-
Finalement, la simplicité et la beauté de l’homéopathie tient dans le fait que lorsque nous diagnostiquons un médicament qui présente une homéopathicité suffisante avec ce signes les plus profonds du patient, nous obtenons une guérison spectaculaire. Plusieurs de mes étudiants psychiatres, sont venus un jour ou l’autre me trouver assez dépités pour me déclarer que là où des années de thérapies se montrent souvent insuffisantes pour faire avancer un cas, la simple prise du médicament indiqué procure un résultat brillant.
Prenez l’enfant Pulsatilla. Il est entièrement structuré par la peur de l’abandon au fond de lui-même et sa réaction c’est de chercher à attirer le maximum de gentillesse, de tendresse, d’émotions pour se sentir en sécurité. Tous son comportement se déduit de cette simple équation: il colle à sa mère, il pleure facilement, il veut qu’on le prenne dans les bras, etc.
Prenez l’enfant Hyosciamus, lui aussi vit dans la crainte constante de l’abandon, mais sa réaction c’est de tout faire pour être vu, pour être remarqué, quitte à gesticuler et faire le pitre. Cela le conduit à une agitation insupportable, à une loquacité marquée, à des pitreries, à des crises de jalousie, etc.
Là où l’homéopathie va plus loin que n’importe quel autre système. Ce qui la rend aussi merveilleusement belle qu’un F= mγ ou E = h ω, c’est d’une part son pragmatisme qui permet d’obtenir des résultats souvent incroyables en un coup de cuiller à pot -pourvu qu’on suive les préceptes de Hahnemann et d’autre part le fait qu’elle intègre l’homme dans toute sa dimension incarnée. Je veux dire par là que si les signes mentaux sont importants, nous ne négligeons jamais les signes physiques qui sont eux aussi le reflet de la perturbation globale. Il nous arrive ainsi couramment de remonter depuis les signes physiques à un niveau plus général ou mental pour poser l’indication du médicament.
Cela pose les limites des interprétations psychologiques dont on a largement abusé dans l’homéopathie au point d’en venir presque à la dénaturer. Ainsi le système homéopathique permet d’effectuer une synthèse de l’ensemble des manifestations de l’individu déréglé et d’obtenir ce que les patients demandent depuis des siècle: une guérison.
Je m’arrête ici pour développer un peu plus ma réponse à votre intéressante question en créant un petit article “Humeur”!
Bonjour,
Ces cas cliniques sont passionnants. Mais quelles dilutions utilisez-vous en dehors des LM? Argentum XM, c’est une korsakovienne?
Merci d’éclairer ma lanterne.
F. Déprez
Bonjour
Oui les K sont notées de deux façons différentes. Pour 200, 1000, 10.000, 50.000, et 100.000 on note respectivement soit:
200, M, XM, LM
soit:
200, 1m, 10m, 50m
Amicalement
EB