Eventualité 14
Patient, réservé ou timide qui déclare que la dose n’a rien fait, mais quelque chose s’est produit sur le plan émotionnel.
Niveaux : B profond, C et D.
Diagnostic : Début de réaction chez les patients de groupe élevé, dose trop faible. Médicament incorrect dans les bas niveaux.
Nous touchons ici une réaction émotionnelle anormale comme on peut les rencontrer très fréquemment chez des sujets Ignatia, Natrum muriaticum ou Thuja. Les patients avec ce type de symptômes mentaux ou émotionnels font déjà partie des niveaux inférieurs de santé. L’organisme a perdu de l’énergie et la perturbation s’est déjà enfoncée dans des régions plus profondes. Ceci est typique d’un cas sycotique, où existe une pression inconsciente écrasante pour maintenir à tout prix une image telle qu’il est parfois presque impossible au patient de voir ou d’admettre qu’un mieux est apparu sur le plan émotionnel. Je me souviens une fois d’avoir été choqué de la manière presque brutale dont George Vithoulkas s’y prenait pour mener l’entretien chez un patient qui avait besoin de Thuja, le moins qu’on puisse dire c’était qu’il ne prenait pas de gants. Et avec le recul je comprends maintenant son attitude, il avait parfaitement raison de ne pas se faire « embarquer » par le patient.
Le pire existe bien sûr, dans les cas où cette attitude fait partie de la maladie, rendant le patient méfiant, secret, voire manipulateur. Ces cas seront beaucoup plus difficiles à traiter. On peut avoir des patients qui inconsciemment aiment être malades afin d’attirer l’attention. Kent évoque un cas similaire dans sa matière médicale à propos de Plumbum metallicum, où une femme atteinte d’une sorte d’état d’hystérie prétendait être malade lorsqu’elle se trouvait en compagnie :
Plumbum crée une tendance à tromper, à frauder. L´acétate de plomb produisit chez une femme, qui en prit un peu pour se suicider, une hystérie confirmée. Elle avait l´aspect d´une hystérique pendant des heures lorsque qui que ce soit la regardait. Quand elle pensait que personne n´était auprès d´elle, elle se levait, marchait de-ci de-là, se regardait dans la glace pour voir comme elle était belle, mais quand elle entendait un pas dans l´escalier elle se recouchait sur son lit et revêtait le masque de l´inconscience. Elle supportait des piqûres en grand nombre et c´est à peine si on distinguait sa respiration. Plumbum établit dans l´organisme un état hystérique, une tendance à tromper, à feindre la maladie, à exagérer ses maux; et, pris comme remède, il va à la racine du mal pourvu que ses symptômes concordent avec ceux du malade.
Vous devez donc être bien prudents et analyser finement les réactions de votre patient, ses moindres hésitations dans ses tournures ou ses réponses. Toute la difficulté tient ici au « make-up » émotionnel qui rend le dialogue, le contact difficile. Le tempérament du patient ne doit jamais constituer une indication pour prescrire. C’est hélas une erreur aussi grave que fréquente et qui a fait perdre bien du temps aux praticiens et aux patients qui attendent en vain qu’on les secoure. Seuls les symptômes que l’on a « reconnus comme indubitablement morbides » permettent de déterminer l’indication du remède.
Attention cependant à ne pas finir par couper les cheveux en quatre. La présente discussion n’a aucun sens dans les niveaux de santé dégradés C à D où nous exigeons une réaction rapide avec à la clé des modifications physiques palpables. Une légère modification sur le plan émotionnel peut être attribuable à un effet placébo, et il faut savoir rester critique de vos résultats.
Dans les groupes plus élevés, ce petit changement sur le plan émotionnel nous réjouit car bien vraisemblablement, en continuant les prises du médicament, la cas va finir par « céder » et nous assisterons au déploiement de l’action de la dose vers des plans plus superficiels.