Polypharmacie et complexes : les plaies de l’homéopathie

Dans Bases de l'homéopathie by Edouard BroussalianLaisser un commentaire

L’article de Terrasienna sur l’automédication, a suscité un grand intérêt et des réactions intéressantes qui vont nous permettre d’effectuer une petite mise au point. Homeopotard, l’un de nos lecteurs nous confie ceci:

Je peux comprendre votre démarche contre les complexes, toutefois avec 35 ans d’expérience du comptoir puis de l’homéopathie complexe comme fabricant, je suis convaincu que pour la survie de l’homéopathie, il vaut mieux un complexe bien indiqué qu’un unitaire mal choisi par un malade non médecin.
N’oubliez pas que les fabricants de complexes peuvent aussi être des producteurs d’unitaires et la vente des uns permet de fabriquer les autres.

Et Terrasienna lui réplique:

J’entends bien votre point de vue. Je sais aussi que Lehning se bat pour fabriquer de bons produits. Simplement, les intérêts ne sont pas les mêmes si l’on se place du côté du soignant ou du pharmacien (ou fabricant), il sera difficile de trouver une ligne directrice commune. Je me réfère en permanence à la notion de niveau de santé du patient, et force est de reconnaître que celui ci ne s’améliore pas en Occident (et dans le monde), rendant la prescription toujours plus difficile. Je me dois d’être sincère et de ne parler que dans l’intérêt du patient.

cocktails2Ne doutant pas de la bonne foi de Homeopotard, qui expose l’opinion de la majorité des gens en France hélas, je voudrais bien préciser que ce qui va suivre n’a rien de personnel, mais le point de vue qu’il expose est malheureusement indéfendable au vu de toute la souffrance humaine qui ne cesse de s’accumuler tandis que rien n’est fait pur diffuser la connaissance de l’homéopathie, unique forme rationnelle de médecine. L’homéopathie n’a jamais été rentable, aux pharmaciens de réfléchir en interne pour trouver d’autres solutions tenables à long terme.

L’expérience

Au sujet de l’expérience, permettez moi de vous citer Hahnemann au §26, vous allez voir que son texte n’a pas vieilli, je viens de terminer la retraduction du 6ème Organon, et je suis heureux de partager ces quelques lignes:

25. — L’expérience pure (a) — le seul et infaillible oracle de l’Art de guérir — nous apprend, dans tous les essais exécutés avec conscience, qu’en effet, le médicament qui, en agissant sur des hommes bien portants a pu produire le plus de symptômes semblables à ceux de la maladie à traiter (§ 153), est le seul qui convienne pour rétablir la santé. Ce médicament doit aussi réellement posséder, administré à dose atténuée et à la dynamisation convenable, la faculté de détruire d’une manière rapide, radicale et permanente, la totalité des symptômes de cet état morbide, c’est-à-dire d’anéantir la maladie présente toute entière. (Voir § 6 à § 16)

(a) Je n’entends pas parler ici d’une « expérience » semblable à celle dont se vantent nos praticiens habituels de la vieille Ecole. Après avoir des années durant combattu, avec une quantité de prescriptions poly-pharmaceutiques, une multitude de maladies qu’ils pensent avoir examinées avec soin, mais que, fidèles aux errements scolastiques, ils ont regardées comme suffisamment connues par les noms qu’elles portent dans la pathologie, ils ont cru apercevoir en elles une substance morbide imaginaire ou quelque autre trouble profond non moins hypothétique.

A la vérité, ils trouvent toujours quelque interprétation, mais celle-ci est purement spéculative et ils arrivent à des résultats qu’aucun être humain, sinon seul un Dieu, pourrait déchiffrer au milieu d’un si grand concours de forces multiples agissant sur une chose inconnue, résultats dont il n’y a rien à apprendre et aucune induction à recevoir.

Cinquante années d’une telle expérience sont comme cinquante ans passés à regarder un kaléidoscope rempli de choses colorées inconnues et qui tournerait perpétuellement sur lui-même: on aurait en fin de compte vu des milliers de figures changeant sans cesse, sans pouvoir se rendre compte d’aucune.

Je prétends ici qu’en aucun cas dans une prescription d’officine on puisse faire mieux que des résultats qui n’ont rien à voir avec ce que l’on est en droit d’attendre de l’homéopathie. Il y a un monde entre tripoter des symptômes et guérir un patient. Si nous nous battons avec cette énergie, c’est parce que nous sommes enthousiasmés des résultats incomparables obtenus.

La non commutativité

L’un des arguments favoris des laboratoires homéopathiques, qui ont besoin de vendre en masse pour exister, donc de déformer les principes les plus élémentaires de l’homéopathie, et pour tout dire des sciences, est de miser sur la relativisation. En gros, l’idée, c’est “du moment que ça marche”, alors c’est justifié, et tout se vaut. Hé bien non, je suis au regret de dire que l’on n’obtient pas le même résultat si on enfile son caleçon après le pantalon. Et encore moins de résultats si l’on donne plusieurs produits à la fois, ce qui rend les éventuels résultats absolument inutilisables.

Pourquoi choisir la médiocrité?

Personnellement j’aurais tendance à me dire que si j’étais malade j’attendrais d’un médecin qu’il fasse le maximum pour me soigner correctement, c’est vrai quant à l’instant présent mais aussi que pendant des années il n’a cessé de progresser et de se former pour peaufiner son art.

Peut-on vraiment bricoler avec la santé ? Au nom de quelle raison devrais-je accepter des compromis et donc des recettes standardisées au lieu de comprendre et évaluer correctement le cas individuel ?

Résumé de la thérapeutique

Probablement personne ne penserait à monter à bord d’un avion piloté par une personne qui ne se soit pas donné la peine d’apprendre à piloter. Personne non plus ne confierait sa voiture à un garagiste qui n’ait pas étudié son travail. Pourtant la plupart des médecins n’hésitent pas à prescrire des globules homéopathiques dont ils n’ont pas la moindre idée ni des effets, ni des lois à observer pour les prescrire, et la plupart des gens n’hésitent pas à demander n’importe quoi pourvu qu’un effet se produise sur le symptôme qui les dérange, sans comprendre que c’est une totalité qui s’exprime.

Alors oui mettre dans une même fiole 3, 4 ou 25 médicaments impliqués dans le rhume des foins, et la vendre par dessus le comptoir, peut éventuellement provoquer quelque effet. Dans un accès de bonté je pourrais même dire que cela part d’une bonne intention pour éviter à ce malade d’avoir recours aux drogues épouvantables de l’allopathie. Mais cette manière de bricoler n’est pas tenable un instant, ni sur le plan éthique que je viens d’évoquer, ni sur le plan médical. Pour mémoire, le major de notre promo est un pharmacien qui a brillamment réussi son examen. Il a appris correctement l’homéopathie, il l’applique avec soin et déborde comme nous tous d’enthousiasme devant les résultats.

Cette approche complexiste qui consiste à mélanger ainsi plusieurs principes actifs est une véritable atrocité qui viole tous les principes:

a) La prescription se fait sur un diagnostic classique, qui n’a aucune existence réelle puisque chaque cas est unique et se manifeste toujours par des signes qui lui sont uniques; violation du §1 de l’Organon

b) Chaque médicament a été expérimenté individuellement, la connaissance de ses propriétés a été payée le prix fort par les volontaires qui ont enregistré leurs souffrances. Comment défendre moralement qu’on utilise leur exploration pour faire du business à la goutte? C’est un détournement d’héritage.

c) En agissant ainsi sur plusieurs paramètres à la fois, il est impossible comme nous l’avons vu de connaître d’avance les véritables effets de la mixture, et encore moins d’en déduire ce qui a agi dans le tas; pure violation des principes de simplicité de l’exploration scientifique

d) Il s’agit d’une allopathisation de l’homéopathie qui ne peut donc porter aucun fruit valable.

e) La question amusante: pourquoi sélectionner n médicaments dans la recette et pas n-1 ? Pourquoi 10 et pas 5 ? A défaut d’une exploration scientifique, le fabricant a-t-il eu une révélation divine? Enfin puisque nous les rares homéopathes guérissons avec un seul médicament à la fois, comment la position est elle tenable?

f) Raisonnons par l’absurde, pourquoi le laboratoire n’a t-il pas inventé le médicament universel: il suffit de mettre dans le même flacon un globule de chaque médicament homéopathique et nous aurions enfin la panacée?

La pure clarté de l’Organon

On me pardonnera ce titre un peu ampoulé mais c’est bien ce que je ressens en découvrant chaque jour un peu plus la pensée du Maître! J’attends toujours de pied ferme celui ou celle qui me démontrera que ce que Hahnemann avance est faux…

70. — En fonction de ce qui a été énoncé précédemment, nous ne pouvons pas manquer de tirer les conclusions suivantes :

I. Que la totalité des symptômes :

— a) représente véritablement tout ce qu’on peut reconnaître de pathologique chez un malade et par conséquent tout ce qui est à guérir,

— b) se manifeste:

1. par l’ensemble des troubles exprimés par le malade,

2. par la totalité des indices révélateurs et des symptômes relevés dans l’anamnèse par le médecin, et

3. par toutes les manifestations objectives recherchées au cours d’un examen complet [y compris paramédical. EB],

— c) fournit la clé de l’indication thérapeutique.

Par ailleurs, toutes les soi-disant causes internes qu’on pourrait attribuer aux maladies, tous les caractères hypothétiques, occultes ou autres qu’on serait tenté de leur assigner, tout élément morbide matériel imaginaire dont on voudrait les faire dépendre, ne sont que spéculations hasardeuses et songes creux.

II. Que ce dérèglement que nous appelons maladie ne peut être converti en santé que par un autre dérèglement de la force vitale, provoqué au moyen de médicaments.

La seule vertu curative de ces derniers consiste donc uniquement dans le changement qu’ils font subir à l’individu, c’est-à-dire dans la production de symptômes morbides spécifiques.

Les expériences faites sur des sujets bien portants sont le meilleur et le plus sûr moyen de reconnaître cette vertu curative.

III. Que d’après tous les faits connus, il est impossible de guérir réellement une maladie naturelle à l’aide de médicaments qui possèdent par eux-mêmes la faculté de produire chez l’homme sain, un état morbide dissimilaire (symptômes morbides dissemblables) différent de la maladie à guérir. D’où il suit que la thérapeutique allopathique ne procure donc aucune vraie guérison. La nature elle-même n’en opère pas davantage: jamais une maladie ne se trouve anéantie, détruite et guérie par une seconde maladie dissemblable ajoutée à l’autre, quelque forte que puisse être cette nouvelle affection.

IV. Que d’après toutes les expériences connues à ce jour, les médicaments susceptibles de faire naître, chez l’homme bien portant, un symptôme morbide artificiel opposé à un autre symptôme de la maladie à guérir, ne produisent qu’un soulagement temporaire dans une maladie déjà ancienne, n’en procurent jamais la guérison, et la laissent toujours reparaître, au bout d’un certain temps, dans un état plus grave qu’elle n’était dans le passé. En un mot cette méthode antipathique et purement palliative est absolument contraire au but qu’on se propose dans les maladies anciennes de quelque importance.

V. Et qu’enfin, la troisième méthode, la seule qui reste encore, à laquelle on puisse s’adresser (la méthode homéopathique) est celle qui emploie contre la totalité des symptômes d’une maladie naturelle, un médicament, administré à la dose correcte, capable de provoquer chez l’homme bien portant, des symptômes aussi semblables que possible à ceux qu’on observe chez le malade.

Or, les maladies ne sont en fait que des dérangements purement dynamiques, causant des aberrations de l’équilibre biologique du principe vital dans sa subtile perception sensitive.

L’homéopathie est ainsi la seule méthode réellement salutaire, la seule par laquelle les maladies sont subjuguées et anéanties par la puissance semblable et plus forte, de nature également dynamique, du remède homéopathique, cela par une intervention indolore, procurant une guérison complète et permanente. La nature elle-même nous en donne l’exemple, dans certains cas fortuits, lorsqu’une nouvelle maladie semblable vient s’ajouter à une ancienne et ainsi l’anéantit, puis la guérit rapidement et pour toujours.

 Conclusion

Je ne vois pas pourquoi nous devrions marchander avec la santé des gens, ni bricoler la nature à l’aveugle comme le font ces Messieurs avec leurs OGM, le nucléaire et les autres insanités chimiques aux effets inconnus injectés à tour de bras à leurs innocentes victimes.

Nous avons une responsabilité à endosser face aux gens souffrants et devant les générations futures qui nous empêche de nous hisser simplement sur les épaules de géants pour administrer pire que la médecine classique, car on ne dispose même pas de l’excuse de l’ignorance en ce cas.

Donner une potion qui contient simultanément des principes actifs c’est avant tout calmer sa propre angoisse, ne pas être capable d’affronter l’échec. Échec justement qui est la seule manière d’apprendre, exactement comme enfant on tombe et retombe avant de savoir marcher.

Il est plus que temps que cesse cette mascarade d’homéopathie et qu’on secoure réellement les gens malades. Ne croyez vous pas?

 

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